C’est une question lancinante, que de nombreux couples établis depuis plusieurs années se posent : « Comment puis-je faire pour qu’il ou elle retombe amoureux(se) de moi ? » Elle surgit le plus souvent après dix, quinze ou vingt ans de vie commune, parfois dans un quotidien où les enfants occupent toute la scène, où la maison est devenue une petite entreprise à faire tourner, et où la passion des débuts semble n’être plus qu’un souvenir nostalgique.

Cette question n’est pas anodine. Elle contient une inquiétude existentielle : la peur de voir se dissoudre ce qui a été patiemment construit, la crainte que l’amour ne soit plus qu’une parenthèse dans une vie vouée à la gestion. Elle exprime aussi une impasse : que faire lorsque l’autre affirme ne plus ressentir « assez de sentiments » ?
L’illusion du contrôle sur les sentiments
La première méprise consiste à croire que vous pouvez « faire » retomber quelqu’un amoureux, comme si aimer relevait d’un mécanisme qu’il suffirait d’actionner. Or, les sentiments ne se décrètent pas.
Mais alors, si vous ne pouvez pas décider de rallumer l’amour chez l’autre, doit-on conclure que tout est perdu ? Pas nécessairement. La véritable question n’est pas : « Comment rallumer une flamme ? » mais : « Comment créer un climat intérieur et relationnel qui rende à nouveau possible l’émergence du sentiment amoureux ? »
(C’est d’ailleurs précisément là qu’un accompagnement extérieur peut être précieux : un coach ou un thérapeute de couple peut vous aider à décoder ce qui bloque, à ouvrir des pistes, à réintroduire du jeu là où la communication s’est figée.)
L’usure amoureuse : un processus naturel
Les psychologues conjugaux s’accordent à dire que l’amour suit des cycles. Le sentiment exalté des débuts – mélange de passion, d’érotisme et d’idéalisation – n’est pas destiné à durer sous la même forme. Esther Perel, dans Mating in Captivity, rappelle que « le désir a besoin de distance autant que d’intimité ». Or, dans la vie conjugale, surtout lorsqu’elle est rythmée par les enfants, cette distance s’évanouit : tout devient connu, prévisible, saturé.
Ainsi, ce n’est pas toujours l’amour qui disparaît, mais son mode d’expression. L’idéalisme du départ laisse place à la routine ; l’admiration initiale cède à l’agacement quotidien. La question n’est pas de savoir pourquoi cela arrive – car cela arrive presque toujours – mais comment le traverser.
Pourquoi l’autre ne se sent plus amoureux ?
Lorsque votre partenaire dit : « Je ne suis plus amoureux(se) », plusieurs réalités se mêlent :
- La perte de reconnaissance : Il ou elle ne se sent plus vu, admiré, désiré. Or, l’amour s’alimente du regard de l’autre. Comme le dit Winnicott, « un bébé n’existe pas sans le regard de la mère ». De même, un adulte cesse de se sentir vivant dans la relation si ce regard d’amour s’éteint.
- La confusion entre attachement et passion : Beaucoup associent l’amour uniquement à l’intensité des débuts. Quand cette intensité se transforme en tendresse et en attachement, ils croient que « l’amour est mort ».
- La saturation du quotidien : Le couple devient gestionnaire du réel – factures, devoirs, courses – au point de perdre l’espace de jeu et de désir.
- La pression des idéaux modernes : Nos sociétés valorisent un amour « toujours intense ». Or, cette exigence permanente rend insatisfait, car nul ne peut maintenir éternellement la ferveur initiale.
Retomber amoureux : un processus réciproque
Et c’est là le cœur de la question : comment créer les conditions pour que l’autre, qui dit ne plus avoir de sentiments, puisse en retrouver ?
a) Réintroduire la curiosité
L’amour naît de la découverte. Or, avec le temps, chacun croit « connaître » l’autre. En réalité, on ne connaît jamais totalement une subjectivité. Redécouvrir l’autre implique de poser de nouvelles questions, de s’étonner à nouveau, de ré-ouvrir un espace de mystère. Comme le note le philosophe Emmanuel Levinas, « le visage de l’autre est toujours ce qui échappe ».
L’amour renaît quand on cesse de réduire l’autre à une évidence. Même après des années d’amour, l’autre n’est jamais acquis.
Agnès Love Coach
b) Réhabiliter l’altérité
Le désir ne survit que dans l’espace laissé à l’autre pour être autre. Dans beaucoup de couples, la fusion initiale s’est muée en contrôle, en surveillance réciproque, en transparence totale. Or, le désir a besoin d’opacité, de distance. Raviver l’amour suppose de laisser l’autre respirer, se différencier, redevenir un sujet séparé.
c) Réactiver la dimension érotique
Par « érotique », il ne faut pas entendre uniquement la sexualité, mais l’ensemble des signaux qui créent du jeu, de la tension, du mystère. Cela peut passer par le soin de soi, par de petites ruptures dans la routine, par l’art de la surprise. Comme l’écrit Georges Bataille, « l’érotisme est l’approbation de la vie jusque dans la mort » : il rappelle que l’amour est d’abord une intensité vitale.
d) Créer des expériences partagées
L’amour s’entretient par la mémoire commune. Un couple figé dans la répétition finit par s’asphyxier. Retomber amoureux suppose de fabriquer ensemble du neuf : voyages, projets, expériences inédites. L’altérité n’est pas seulement intérieure, elle est aussi dans le monde que vous explorez à deux.
e) La parole vraie
C’est sans doute le plus difficile : exprimer sa peur, son désir, sa vulnérabilité, sans reproche ni exigence.
Osez dire : « J’ai peur de te perdre », plutôt que : « Tu ne m’aimes plus ». Car c’est dans la capacité à être seul en présence de l’autre que se construit l’intimité. Autrement dit, l’amour renaît quand vous osez être vrai, même dans votre fragilité.
Agnès LoveCoach
(Au besoin, un accompagnement peut vous aider à rendre ces dialogues possibles : beaucoup de couples n’arrivent plus à se parler sans conflit, et un regard extérieur bienveillant permet souvent de retrouver la sécurité nécessaire pour se dire les choses sans se déchirer.)
Break, distance ou lits séparés ? Une vraie question…
Quand l’un des partenaires dit « je doute de mes sentiments » ou refuse désormais toute intimité sexuelle, beaucoup de conjoints s’interrogent : faut-il faire un break ? Dormir séparément ? Forcer la proximité ou, au contraire, créer de l’espace ?
La vérité est que chaque couple a sa propre dynamique, mais plusieurs éléments sont essentiels :
- Le break total est risqué : il donne souvent à celui qui doute un espace pour se détacher encore davantage. Sauf cas de crise extrême, il vaut mieux privilégier une distance contenue plutôt qu’une séparation nette.
- Dormir séparément peut être une respiration : ce n’est pas forcément la fin du couple, mais une manière de réduire la pression, d’éviter que le lit conjugal devienne un lieu de tension. Beaucoup de couples témoignent que ce choix provisoire apaise et permet de se retrouver autrement.
- Ne pas forcer le corps : si l’un dit ne pas vouloir de relations sexuelles, insister ne fait qu’aggraver le rejet. Respecter ce rythme est une preuve de maturité, même si cela est douloureux.
- Réinventer l’intimité autrement : un câlin, une promenade, une parole douce peuvent recréer du lien quand la sexualité est suspendue.
Et si, malgré tous ces efforts, votre partenaire refuse toujours les rapports sexuels, tout en déclarant ne pas vouloir se séparer ?
C’est une situation fréquente, mais aussi très complexe. Elle traduit souvent une ambivalence : d’un côté, le désir ou l’attirance ont disparu (ou sont gelés), de l’autre, l’attachement, la peur de la solitude ou le confort affectif retiennent de rompre.
Dans ce cas, le risque est de s’installer dans une relation « sans amour » ni érotisme, qui devient une cohabitation affective. Il est alors vital de mettre des mots clairs : qu’attendez-vous l’un de l’autre ? Quel type de couple voulez-vous construire ? Une relation peut survivre sans sexualité, mais elle ne peut pas survivre sans vérité. Un accompagnement extérieur est souvent décisif ici, pour vous aider à dire ce que vous n’arrivez pas à formuler seul.
Quand celui qui doute attend tout de l’autre
Il arrive souvent que le partenaire en perte de désir ou de sentiments se place dans une posture paradoxale : il exprime son manque, mais attend que tout vienne de vous. Comme si c’était à vous, le conjoint « resté amoureux », de redoubler d’efforts, de séduire, de relancer, de porter le poids du couple.
Cette asymétrie est dangereuse. Car si l’amour suppose une réciprocité, cette logique place l’un dans le rôle d’« acteur » et l’autre dans celui de « spectateur » qui juge, évalue, attend. Or, aucune renaissance amoureuse ne peut se faire si la personne qui doute ne prend pas, elle aussi, une part active dans la reconstruction. Retomber amoureux n’est pas un cadeau que l’on reçoit passivement : c’est une dynamique qui engage les deux.
Concrètement, cela se traduit souvent par des phrases comme :
« Montre-moi que tu peux me séduire à nouveau. »
« C’est à toi de me donner envie. »
« J’attends de voir si mes sentiments reviennent. »
« Si tu changes, peut-être que ça reviendra. »
Dans cette logique, celui qui doute se met en position d’examinateur, tandis que vous devenez candidat permanent à l’amour, obligé de « prouver votre valeur ». Ce rapport est profondément injuste : il vous épuise et infantilise l’autre.
Psychologiquement, cette posture traduit souvent :
• une peur de s’impliquer (prendre le risque de redonner, d’aimer à nouveau, d’assumer sa vulnérabilité) ;
• une idéalisation passive de l’amour (comme si le sentiment devait « tomber du ciel » et non être construit) ;
• une dépendance affective inversée : celui qui doute teste sans cesse si vous êtes prêt à tout pour lui/elle, tout en se protégeant de la réciprocité.
La psychanalyste M. Balmary rappelle dans ses travaux que « l’amour n’est jamais un dû, mais toujours un acte ». Si celui qui doute refuse de s’engager, alors vous porterez seul une charge impossible : devenir à la fois le moteur, le miroir et la solution.
Agnès Love Coach
C’est une situation d’épuisement affectif qui, à terme, détruit la relation. Il est donc essentiel de redonner une responsabilité à celui qui doute : qu’il exprime, qu’il explore ses blocages, qu’il accepte de se remettre en question. Retrouver le désir ou l’amour n’est pas qu’une affaire de séduction reçue, c’est aussi un travail intérieur.
L’accompagnement en coaching ou en thérapie de couple est ici déterminant, car il oblige chacun à sortir de cette posture d’attente pour redevenir sujet de son propre désir.
L’obstacle majeur ? La peur
La plupart des tentatives échouent parce que la peur domine. Peur de souffrir, peur de donner sans retour, peur de se ridiculiser. Or, aimer implique une forme de vulnérabilité. Comme le rappelle Erich Fromm dans L’art d’aimer, « aimer n’est pas un sentiment passif, mais un acte, une décision, une capacité ».
Pour la personne qui doute, il ne s’agit pas seulement d’attendre de ressentir à nouveau, mais de s’engager dans une posture active qui crée la possibilité de l’amour.
Agnès Love Coach
Conclusion : redevenir aimable :
Vous ne pouvez pas « forcer » l’autre à retomber amoureux. Vous ne pouvez pas décréter ses sentiments. Mais vous pouvez redevenir source d’inspiration, d’étonnement, de vitalité. Vous pouvez redevenir aimable – non pas au sens de « gentil » mais au sens fort : digne d’être aimé. La question donc n’est pas seulement : « Comment faire pour qu’il/elle m’aime encore ? » mais : « Comment puis-je, moi, redevenir vivant, désirable, étonnant, en sa présence ? » Car au fond, ce n’est pas la flamme qui se rallume par magie : c’est la lumière intérieure de chacun qui, lorsqu’elle se remet à briller, éclaire à nouveau l’autre.
Si vous vous reconnaissez dans ces questionnements et que vous sentez que seul(e), vous n’y arrivez pas, c’est exactement le rôle d’un coaching amoureux : vous accompagner pas à pas pour comprendre ce qui bloque, transformer votre posture, et recréer le terrain où l’amour peut refleurir.